Le sport suisse manque de femmes dirigeantes: voici les solutions
Lorsque Viola Amherd a proposé, début 2022, un quota de 40% de femmes dans les organes dirigeants des fédérations et associations sportives, le monde du sport helvétique a été secoué. Rares étaient les organisations qui s’approchaient de ce chiffre. Mais la conseillère fédérale n’a pas cédé, et a fixé l’entrée en vigueur de cette mesure au 1er janvier 2025.
Depuis, la question n’est plus tant «comment avoir des femmes au pouvoir?», mais «où trouver ces femmes?». Chez Swiss Olympic et dans le réseau pour la promotion des femmes dans les affaires sportives Sporti{f}, on a voulu dépasser les plaintes récurrentes de ceux qui affirmaient ne pas pouvoir remplir le quota.
Une démarche efficace
La solution proposée? Un programme de formation de neuf mois destiné à renforcer les compétences de direction des femmes et à promouvoir l’égalité des chances et la diversité.
En mars, les deux organisations ont lancé, avec le soutien de l’agence zougoise de développement des talents SheSkillz Global, un programme de mentorat pour des femmes issues de fédérations et de clubs. 28 dirigeantes confirmées ou potentielles ont ainsi bénéficié du soutien personnalisé de deux mentores; l’une suisse, l’autre internationale, afin d’être formées, incluses dans un réseau et encouragées à occuper des fonctions clés dans le sport suisse.
Coachées par une icône norvégienne du sport
Le programme s’adresse aussi aux sportives qui, après leur carrière, souhaitent accéder à des postes de direction. Parmi les participantes figuraient des personnalités connues, comme l’ancienne footballeuse Lara Dickenmann ou l’ex-skieuse de Coupe du monde Tamara Wolf.
Parmi les mentores, qui doivent également soutenir le développement personnel des participantes au sein d’un réseau d’entraide, figurait la plus grande footballeuse norvégienne de tous les temps, la championne olympique, du monde et d’Europe Hege Riise, ainsi que Kristin Felde, ancienne secrétaire générale de la fédération norvégienne de ski et actuelle responsable du centre olympique national.
Encore une grosse marche de progression
Le programme de formation s’est achevé par une publication collective. Lors du Sportforum de Lucerne, les 5 groupes ont présenté lundi à un jury d’experts leurs idées, leurs analyses et leurs propositions sur le thème du leadership féminin dans le sport. Le projet lauréat a ensuite été désigné.
Le financement du programme de mentorat par la Fondation pour la promotion du sport suisse, ainsi que son partenariat avec le plus grand congrès de l’économie du sport du pays, qui sert de vitrine aux futures dirigeantes, sont prévus pour une durée initiale de trois ans. L’appel à candidatures pour la deuxième édition est déjà en cours, et la demande est forte.
Le projet lauréat du Sportforum s’est penché sur la question suivante: «Comment faire accéder davantage de femmes à des postes de direction dans la gestion sportive et l’organisation d’événements?» Les chiffres restent en effet décevants. Les femmes n’occupent que 14% des postes de présidence et 16% des directions. Dans les médias aussi, leur visibilité demeure faible, et à peine 13% de la couverture sportive leur est consacrée.
Les femmes doutent beaucoup plus
Dans leurs présentations, les groupes ont mis en lumière à la fois les causes de ces inégalités et des pistes de solution. La conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, les structures traditionnelles et les rôles encore très ancrés dans le sport suisse, la formation, la visibilité et, surtout, une tendance au doute excessif freinent souvent les carrières féminines dans les instances dirigeantes.
Les 28 participantes appellent ainsi à un changement culturel à tous les niveaux afin de créer des espaces et de leur ouvrir des portes. Les fédérations devraient planifier activement la reconversion des athlètes et permettre des codirections aux différents échelons des directions. Elles soulignent aussi l’importance de formations et d’horaires flexibles, du télétravail, de la garde d’enfants et d’une meilleure planification des réunions.
Certaines idées se distinguaient, comme la création d’un High Potential Pool pour jeunes dirigeantes, d’un «réseau du doute», la production d’un podcast régulier ou la remise d’un prix annuel. Ces initiatives visent à la fois à accroître la visibilité des femmes dirigeantes et à renforcer leur confiance en elles.
Des rencontres de réseautage, des coachings axés sur l’audace et le développement de programmes de mentorat doivent aussi consolider durablement la présence féminine dans le sport suisse. Après la présentation des 28 femmes à Lucerne, une chose est apparue évidente, le sport suisse ne peut pas se permettre de se priver d’un tel potentiel de leadership.
Traduit de l'allemand par Joel Espi
