Romaine Morard est journaliste, Christian Constantin président de club de football et Mickaël Facchinetti footballeur professionnel. Les trois partagent une passion commune, l'Italie, un amour qui se matérialise à travers le football et la «Squadra Azzura». Ils nous expliquent pourquoi.
Cette ferveur pour l'Italie remonte souvent à loin, à l'enfance, à une période de la vie qui forge souvent de beaux souvenirs. Christian Constantin est de ceux-là: «Ma relation avec l'Italie a commencé quand j'avais environ 4 ou 5 ans. J'allais sur les chantiers de mon père et je coupais la mortadelle avec les ouvriers italiens pendant leur pause, je partageais beaucoup de moments avec eux. Je me suis tout de suite attaché à cette culture humaine du sud.»
Ce premier lien avec la botte, il arrive un peu plus tard dans la vie de Romaine Morard, productrice de «La matinale» sur la Première: «J'avais 10 ans quand je me suis passionnée pour l'Italie. J'étais fascinée par ce pays, notamment par sa musique et ses chanteurs comme Eros Ramazzotti. J'apprenais les paroles et je tentais de les traduire. C'étaient souvent des chansons d'amour, ça me plaisait beaucoup. Je me rappelle également de la chanson du Mondial 1990, «Un estate italiana». J'achetais même des dictionnaires pour apprendre cette langue qui me rend heureuse rien qu'en l'écoutant. Quand j'entends quelqu'un parler italien, je souris, c'est plus fort que moi, c'est ancré en moi.»
Pour Mickaël Facchinetti, aujourd'hui footballeur à Lugano, c'est forcément un peu différent. Petit-fils de Gilbert Facchinetti, il grandit dans un environnement très proche de l'Italie, la patrie d'origine de son grand-père: «Ma famille est d'origine italienne, forcément j'ai toujours été bercé par ces deux cultures comme des milliers de personnes en Suisse. La communauté italienne est énorme ici. Je pense que c'est ce qui fait que la relation entre les deux pays est aussi fusionnelle.»
«On doit beaucoup aux Italiens. Ils ont bâti la Suisse moderne. Depuis tout petit, sur les chantiers de mon père, j'ai toujours apprécié ces mecs, des travailleurs humbles et fiers.» Christian Constantin n'a jamais caché son amour pour l'Italie, lui qui roule en Ferrari et en Lamborghini.
Son canton, dont il est si fier, est géographiquement et historiquement attaché au voisin du sud, comme il le souligne: «Il ne faut pas oublier qu'à la base, on faisait partie du Royaume de Savoie dont la capitale était Turin. En Valais, nos patois sont également très similaires à ceux pratiqués dans le Val d'Aoste. On est lié à l'Italie en Valais depuis très longtemps. Mais attention, tout n'a pas été aussi simple. Dans les années 60, il y avait une sorte de chasse à l'Italien en Suisse par certains partis politiques. Notre rapport avec les Italiens est vraiment particulier et profond.»
Romaine Morard partage également cette analyse, elle qui a grandi dans une autre région du Valais, où la communauté italienne est très présente: «Au collège, j'étais entourée de «segundos», d'amis d'origine italienne. Tout comme à l'Uni à Genève d'ailleurs. Ces amitiés ont approfondi mon lien avec ce pays.»
Mickaël aurait pu être l'un de ces binationaux, même si dans son cas, on parle déjà de la troisième, voire de la quatrième génération établie dans notre pays: «Tout le monde, ou presque, en Italie, a un proche en Suisse. Il y a beaucoup de respect entre nos deux pays, et c'est certainement lié à ce phénomène social important qu'a été l'émigration italienne en Suisse. C'est aussi ce qui différencie cette relation à celle que nous avons avec la France. Les Français nous respectent moins, la preuve encore la semaine dernière avec les propos lunaires de Raymond Domenech. Tout cela concorde à rendre notre voisinage avec la France assez vite conflictuel et toxique.»
Un avis très clairement partagé par le président du FC Sion:
Ses plages, sa nourriture, sa joie de vivre, sa musique, ses voitures... Sans entrer dans la caricature, l'Italie a quelque chose de fantasmagorique. Ce pays inspire depuis des siècles les écrivains et cinéastes. Il devient même difficile de ne pas apprécier cette contrée qui nous a tant offert sur le plan de l'art, de la musique, du sport ou de l'humanité tout court, ne serait-ce qu'avec sa joie de vivre caractéristique. «La Felicita», de Al Bano, Romaine Morard la retrouve à chaque fois qu'elle traverse la frontière :
Christian Constantin entretient lui aussi, de par ses fonctions, une collaboration très forte avec l'Italie:
Pour Mickaël Facchinetti, qui a fait du football son métier, la culture de son pays d'origine et sa forte passion pour le calcio l'ont fortement poussé vers cette orientation professionnelle. Et de citer une anecdote:
L'ancien joueur du Chievo affirme que pour lui, comme pour de nombreux footballeurs, l'Italie a toujours été une source d'inspiration. Elle possède des références à tous les postes: «De Buffon à Baggio en passant par Pirlo, ou Del Piero, on a tous été inspirés par un joueur italien, mais également par la culture du calcio, ses stades, ses succès, ses supporters.»
Si l'équipe d'Italie de 2006 était remplie de «fuoriclasse», ces joueurs de classe internationale comme Cannavaro, Nesta, Del Piero, Totti ou encore Gattuso, celle de 2021 se distingue davantage par son collectif.
Pour Christian Constantin, cette équipe a retrouvé les valeurs d'antan: «Roberto Mancini est revenu aux bases, aux valeurs de l'Italie: le travail et la fierté. Il a construit un groupe solide avec des joueurs issus de clubs comme l'Atalanta ou Sassuolo, qui n'étaient pas forcément représentés il y a quelques années. Mais attention, l'équipe de 2006 était également très solide collectivement. Elle partageait les mêmes valeurs que cette année, une humilité mêlée à une volonté de travailler et de rendre fière la patrie.»
🇮🇹 #ITAAUT
— beIN SPORTS (@beinsports_FR) June 26, 2021
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Analyse similaire du côté de Mickaël Facchinetti. Et le latéral de Lugano est plutôt bien renseigné puisqu'il compte, en la personne de Francesco Acerbi, un ami proche dans le vestiaire de la «Nazionale».
Romaine Morard est une excellente journaliste mais elle le dit elle-même, le football, elle n'y connait pas grand-chose. Toutefois, pas besoin d'être une experte pour apprécier cette équipe d'Italie: «J'adore la voir jouer. Elle donne l'impression de tout donner sur le terrain. En plus, elle revient de loin avec son absence de la Coupe du Monde 2018. Pour moi, il manque juste Gianluigi Buffon (rires).»
Alors oui, cette équipe est plaisante à regarder et elle dispute au Danemark la hype de l'été à l'Euro. Mais a-t-elle les ressources pour remporter la compétition? Tous sont confiants.
Quelle que soit l'issue finale de l'Euro, l'Italie a déjà reconquis le coeur de ses «tifosis», au pays comme en Romandie. Une histoire d'amour meurtrie en 2018 mais toujours vivante et passionnante, comme le chantait Eros Ramazzoti: «Ci vuole passione con te, non deve mancare mai» (Il faut de la passion avec vous, elle ne doit jamais faire défaut).