Comme chaque été, le Paris Saint-Germain annonce un changement de paradigme, un nouveau cycle, une nouvelle ère. Textuellement: «De gros changements vont arriver, un nouveau cycle va commencer, vous verrez», a claironné le président Nasser Al-Khelaïfi dans le Parisien. Sa conclusion: «On construit». Ce que l'on pourrait résumer ainsi: «Détruire pour mieux reconstruire».
Ce mardi, le PSG a présenté Christophe Galtier, son forcément nouvel entraîneur, comme une validation du processus. Nous avons recensé les contradictions de sa stratégie à travers les déclarations tapageuses de Nasser Al-Khelaïfi ces trois dernières semaines.
C'est le nouveau (!) mantra du président qui, soudainement, semble considérer le prestige et la carrière comme un défaut, un vice, jusqu'à une certaine vulgarité de la célébrité (une renommée que le PSG cultive pourtant avec un département marketing pléthorique).
Question sémantique: à partir de quand un joueur top-top, présenté en ces termes par la direction du PSG, est-il considéré comme un joueur bling-bling? A partir de sa première murge un lundi soir (Hakimi)? De son second mariage (Verratti)? De son cinquième carnaval de Rio (Neymar)? De son vingtième tatouage (Messi)?
Il y a une année exactement, le PSG alignait ses recrues sur la pelouse du Parc des Princes, avec fumigènes et musique à coin, en annonçant «une journée historique pour le club et le monde du foot». Un an plus tard, il casse ces mêmes jouets joueurs avec fracas (bling, bling, bling...). En quinze minutes sur la pelouse du Real Madrid, quinze petites minutes d'égarement face au futur champion d'Europe, il n'a plus vu en eux que des noms. Puis il a décidé de les biffer.
Plus intéressant, sous l'angle de la connaissance du genre humain: le «nouveau» PSG semble envisager qu'un joueur laborieux et méconnu sera intrinsèquement moins festif, moins attiré par le moscow mule et les mannequins slovaques.
Le PSG veut en finir avec les privilèges et les statuts. «Il faut se discipliner, sur le terrain et en dehors. Sinon ciao!» Nasser Al-Khelaïfi sous-entend que Neymar, en particulier, a abusé du système. Question pratique: qui lui a accordé des vacances prolongées, des week-ends et des passe-droits, contre l'avis des entraîneurs? Qui l'a autorisé à poursuivre sa rééducation au Brésil en y envoyant des physios du PSG? Qui a prolongé son contrat jusqu'en 2027, sans autre forme d'exigence ou de contrepartie? En clair: qui a alimenté le système?
Neymar a bien compris que son président l'avait lâché: ce mardi, il s'est présenté à l'entraînement avec une semaine d'avance!
Neymar et Marquinhos ont écourté leurs vacances pour reprendre l’entraînement avec le PSG. 🔙🔴🔵
— Actu Foot (@ActuFoot_) July 5, 2022
Ils n’étaient attendus que la semaine prochaine. pic.twitter.com/TAq5z0OHyB
Lionel Messi aime-t-il le club? Il est arrivé à Paris en larmes, déprimé et hagard, parce que Barcelone n'avait pas l'autorisation de lui offrir un nouveau contrat et parce qu'aucun autre club n'avait les moyens de l'engager. Aime-t-il se battre? A moins de considérer la marche comme un mouvement de révolte, ce n'est pas criant. Aime-t-il gagner? Comme tout le monde. Pourquoi est-il épargné? Autre question...
En contradiction totale avec la «nouvelle» obsession du club qui consiste à gagner des matchs, Messi fait gagner des parts de marché. Nasser Al-Khelaïfi le dit lui-même, se contredit même: «On a réussi un deal incroyable, sur le terrain comme en dehors (réd: notez que la discipline a disparu du champ sémantique). Moins d’un an après, il est déjà rentabilisé». Un joueur qui ramène des sous (gling-gling).
Nasser Al-Khelaïfi promet d'inaugurer bientôt le meilleur centre de formation du monde et d'y fabriquer le «nouvel» Mbappé. «Pour les prochaines années», il rêve d'une équipe «100% parisienne». «Il y a tellement de talents dans notre région. Les meilleurs joueurs de notre région méritent de jouer pour le PSG.»
Dans le même temps, plusieurs agents ont été informés que le PSG ne s'opposera pas à un départ de Presnel Kimpembe «si une offre satisfaisante» lui parvient (selon la formule consacrée). Kimpembe, l'un des derniers Parisiens de l'effectif et titulaire en équipe de France...
Nasser Al-Khelaïfi veut «inculquer la culture du travail». C'est pour cette raison même qu'il avait engagé Mauricio Pochettino, un Argentin à l'ancienne, dur, dont les préparations physiques figurent parmi les plus éprouvantes en Europe. Question logique: pourquoi lui avoir dicté des choix diplomatiques (pas d'esclandre, titularisation de Messi, cohabitation entre deux grands gardiens, etc.) si les motivations étaient footballistiques? «On a empêché Pochettino d'imposer sa méthode et maintenant, on le vire parce qu'il n'a pas apposé sa patte», compatit un collègue.
Christophe Galtier est arrivé avec le torse bombé, engoncé dans un costume serré qui semble déjà l'étouffer. Devant la presse, mardi, tous les messages y sont passés: «Il n'y aura pas de compromis». «Il n'y aura pas un joueur au-dessus du groupe.» «Il faut avant tout gagner.» Et sinon, quoi de neuf?
«La fin du bling-bling» avait déjà été décrétée en 2016, exactement en ces termes, après une élimination en Ligue des champions contre Manchester City. «Ce ne sera pas facile pour tout le monde mais c'est le moment de changer. Il faut relancer un nouveau cycle», avait prévenu Nasser Al-Khelaïfi, déjà dans Le Parisien.
Laurent Blanc était parti avec des indemnités somptuaires, remplacé par Unai Emery. RMC Sport rappelle que le PSG avait annoncé «un mercato basé sur l’envie des joueurs plus que sur leur côté bling-bling».
Cette stratégie a tenu un an - la durée de vie moyenne d'une conviction au PSG. En 2017, le club a déboursé 222 millions d'euros pour Neymar et 180 millions pour Mbappé. Mais «cette fois», ce sera différent.