Sur le parking de Vufflens-la-Ville dimanche matin, quelques instants avant le départ de la dernière étape du Tour de Romandie, Yvon Madiot est inquiet. Le directeur sportif de la Groupama FDJ grimace, se pince les lèvres. Son coureur Thibaut Pinot a pourtant réalisé une magnifique prestation la veille (2e de l'étape reine), mais il peine à se réjouir. Car une autre menace plane sur son équipe, bien plus sournoise que la concurrence: le Covid. «On n'a pas tellement d'arme pour lutter contre le virus», admet-il.
Or le Covid a refait son apparition dans le peloton. Plusieurs coureurs ont été testés positifs ces dernières semaines sur les grandes courses, dont au moins deux sur la boucle romande, qui s'est achevée ce dimanche par la victoire d'Adam Yates au classement général. Deux seulement? Piet De Moor, le médecin de l'équipe Cofidis, n'est pas loin de penser que ce chiffre ne reflète pas la réalité: «Il y a eu beaucoup d'abandons depuis le départ mardi au Bouveret (réd: 24 au total). On a dit qu'on avait eu deux cas positifs, quand d'autres équipes ont simplement expliqué que leurs coureurs étaient malades. Mais bon...» Sa phrase se termine par un petit rire tout en sous-entendus.
Le médecin du Tour de Romandie, Vincent Chollet, nous a confirmé dimanche matin qu'il n'avait pas eu connaissance d'autres cas positifs hormis les deux non-partants de la Cofidis, expliquant toutefois que le virus avait fait son retour en force: «Il semblerait qu'il y ait une bonne recrudescence des cas de Covid dans la société en général». «Mais comme les gens ne se font pas tester, ils n'apparaissent pas dans les statistiques», estime le Dr. De Moor.
Cette hausse inquiète les équipes cyclistes à l'approche du Tour d'Italie, qui s'élance samedi prochain des Abruzzes. Certaines d'entre elles invitent leurs coureurs à faire attention, mais attention à quoi? «On ne peut pas vivre en vase clos comme on l'a fait au plus fort de la crise», reconnaît Madiot.
La Groupama FDJ essaie de se protéger en demandant par exemple aux invités qu'elle accueille de se faire tester avant de se déplacer. Mais c'est loin d'être suffisant. «Le soir à l'hôtel, nous avons inévitablement des contacts avec des gens extérieurs à l'équipe», dit le directeur sportif.
Les établissements n'étant plus en devoir d'instaurer des mesures de distanciation, ils font cohabiter les sportifs et les autres clients sans distinction.
La plupart des formations du peloton ne soumettent plus leurs champions à des tests systématiques. Désormais, elles réagissent plus qu'elles ne préviennent. «Chez nous, s'il n'y a pas de symptômes, il n'y a pas de contrôle, nous dit une formation présente sur la boucle romande. Mais au moindre doute, gorge qui gratte, température supérieure à la moyenne, c'est test direct.»
Puisque chaque équipe dispose de son propre médecin, les coureurs (dont 87% d'entre eux étaient vaccinés en janvier 2022, selon la Fédération internationale) peuvent bénéficier de tests antigéniques. L'équipe Cofidis en a d'ailleurs emmené 100 avec elle sur le Tour de Romandie.
Elle aurait espéré ne pas en avoir besoin, surtout que, contrairement à la plupart de ses adversaires, elle avait pris un maximum de précautions en amont, demandant à chaque membre de l'équipe (coureur et staff) de se tester à la maison avant de rejoindre le groupe pour la course. Ce qu'elle n'avait pas prévu, en revanche, ce sont les apéros des clients de son hôtel, chaque soir après l'étape.