Les directeurs sportifs sont passés à côté de lui. Et si un club de LNB n'avait pas connu de grosses difficultés sportives et économiques, il ne serait sans doute jamais venu en Suisse. Aujourd'hui, il est tout simplement le meilleur joueur de ce premier quart de saison en National League.
Oui, aucun attaquant n'a été autant efficace que le Canadien Christopher «Chris» DiDomenico au cours des sept dernières années. Il a ramené Langnau dans l'élite puis lui a offert les play-off. Il a permis à Fribourg-Gottéron de gagner sa première série de play-off après sept ans de vaches maigres. Désormais, il œuvre au réveil du CP Berne (actuel 6e du classement) après une longue agonie sportive de trois ans. Comme par exemple quand il marque le but décisif en prolongation (4-3) à Davos, samedi dernier, ou qu'il permet aux Bernois de ramener un point de Zoug ce vendredi grâce à son doublé (défaite 3-2 après tirs au but).
Chris DiDomenico a certes remporté de nombreux trophées en juniors, comme par exemple le titre de champion du monde U20 avec le Canada en 2008/2009 (son coéquipier à Berne Cody Goloubef faisait aussi partie de cette sélection). Mais une grave blessure à la cuisse a méchamment brisé son élan en mai 2009, alors qu'il était encore junior. En été 2012, il est finalement parti pour l'Italie, à Asiago, où il a eu de fantastiques statistiques en deux ans.
La suite se passe en Suisse. Langnau est relégué en LNB au printemps 2013 et devient un club ingérable: l'entraîneur et les deux étrangers doivent partir en automne et, par moments, même le poste de directeur sportif est vacant. L'administrateur Christoph Bärtschi, qui est depuis des années – et encore aujourd'hui – la bonne âme du bureau, cherche sur Internet un étranger de remplacement et son attention est attirée par les statistiques de Chris DiDomenico. Un petit comité emmentalois se rend alors à Asiago et négocie avec le président local, quasiment avec la monnaie des fonds de tiroirs, le départ du Canadien pour Langnau.
C'est ainsi que commence son étonnante carrière suisse. Après une sauvage mais jolie aventure avec les Tigres, DiDomenico part tenter sa chance en NHL (Ottawa Senators) lors de la saison 2017/2018. Il revient en Emmental dès la saison suivante. Mais un clash survient en novembre 2019 entre l'attaquant canadien et le directeur sportif de l'époque, Marco Bayer – aujourd'hui entraîneur de l'équipe nationale des moins de 20 ans en échec chronique: Bayer envoie valser DiDomenico, venu lui parler de ses désirs de prolongation.
L'argument du directeur sportif? Le Canadien doit d'abord faire ses preuves. Après cette grave insulte, Chris DiDomenico signe un mois plus tard à Fribourg-Gottéron. Il y jouera, sous les ordres de Christian Dubé, de 2020 à 2022. Depuis, Langnau n'est assurément plus le même sans «DiDo».
En été 2022, il signe un contrat de deux ans avec le CP Berne. Pour des raisons purement financières: Christian Dubé a voulu s'en tenir au budget et ne lui a proposé que 260 000 francs nets de salaire annuel, Langnau juste un petit peu plus (280 000 francs nets). C'est finalement le club de la capitale qui a mis le grappin sur l'attaquant convoité, en lui offrant 320 000 francs nets. Un bon investissement.
Chris DiDomenico est l'étranger parfait pour le CP Berne: son intelligence de jeu et son imprévisibilité, doublées d'une forte personnalité, sont d'une valeur inestimable dans un système très standardisé et une équipe dirigée par un entraîneur sans charisme. Le Canadien, qui est l'attaquant de National League avec le plus de temps de glace, semble avoir une énergie inépuisable.
Sa passion apporte les émotions qui ont redonné vie aux Ours. Il a été le joueur le plus sanctionné du championnat en LNB (saison 2014/15) et en LNA (2018/19). Son explication personnelle? «Je déteste perdre.» Mais il en a tiré les leçons. Désormais, il met «l'intensité au bon moment».
DiDomenico n'a jamais été aussi bon qu'aujourd'hui. La raison: il est devenu plus détendu, plus serein, tout en sachant toujours mettre de l'intensité quand il le faut. De quoi amener aussi un peu de tranquillité au manager du CP Berne, Raeto Raffainer, qui peut voir la suite de la saison un peu plus paisiblement.
Adaptation en français: Yoann Graber