Vingt-sept tirs à deux. Sans parler des «expected goals», outil de donnée très prisé dans le football moderne, qui calcule le nombre de buts potentiels par équipe (autrement dit, la qualité des occasions de buts): 4,43 xG à 0,08.
Face à une Irlande du Nord réduite à dix après 36 minutes, la domination helvétique a été totale. Pour un «petit» 2-0 au final... La Nati s'est créée beaucoup d'occasions, notamment autour de son duo Shaqiri-Embolo. L'attaquant du Borussia Mönchengladbach, longtemps annoncé comme le «grand attaquant» national, s'est montré décisif mais n'a pas marqué. Tout un paradoxe.
Titularisé à la pointe de l'attaque de l'équipe nationale à la place d'Haris Seferovic (blessé), Breel Embolo a amené du mouvement et de la percussion à des Britanniques dépassés. Sa performance est à créditer de deux passes décisives.
2. L'activité constante autour des 16 mètres, les mouvements, la disponibilité de tous, les frappes au but (25). Autour de Shaqiri et Embolo qui ont des qualités que personne d'autre n'a dans cette équipe, on a vu le jour hier après la nuit de Belfast il y a un mois.
— David Lemos (@davidlemos) October 10, 2021
Sur le premier but, c'est toute sa qualité physique qui fait la différence. Sur une perte de balle à mi-terrain des Irlandais, Embolo a juste besoin de trois touches de balle pour accélérer, traverser le terrain et servir Zuber qui n'a plus qu'à conclure. Beaucoup, beaucoup de puissance (et un peu de réussite) sur cette action qui met en lumière cette qualité que personne d'autre n'a dans cette équipe de Suisse.
Mais Breel Embolo n'est pas seulement un monstre physique. S'il n'est pas toujours récompensé par des buts, il sait également prouver son intelligence de jeu, comme sur le deuxième but samedi soir. Alors qu'on joue les arrêts de jeu et que la fait peut parfois défaut à ce moment du match, Embolo se retrouve en un contre un sur une contre-attaque. Petit coup d'œil, petit crochet, et un service millimétré pour Christian Fassnacht qui n'a également plus qu'à conclure. 2-0, merci, au revoir.
De la puissance et de l'intelligence de jeu, deux qualités qui ont permis à la Suisse de s'imposer. Mais est-ce suffisant?
En parallèle, l'attaquant formé au FC Bâle a passablement vendangé devant les cages irlandaises. Un défaut qui le poursuit depuis longtemps en équipe nationale. Il reste bloqué à six réussites en 49 rencontres, soit un but tous les huit matches.
Samedi, il a eu deux très grosses occasions: à la 55e minute et, surtout, à la 72e, après un travail exceptionnel de Kevin Mbabu. Des situations qui doivent finir au fond des filets à ce niveau-là. Depuis son départ du FC Bâle en 2016 pour la Bundesliga, Embolo n'a par ailleurs jamais réalisé une saison à dix buts ou plus: il ronronne à une moyenne de 3 à 8 réussites, son maximum.
Des statistiques qui nous rappellent que Breel Embolo n'est pas un vrai attaquant, un vrai finisseur. Il est clairement plus à l'aise dans un rôle de deuxième attaquant, de faux neuf ou d'ailier. Dans le système de jeu actuel de la Nati, il est donc difficile de l'imaginer à long terme à ce poste, seul à la pointe de l'attaque.
Même si son attaquant est resté muet sur la pelouse du stade de Genève, Murat Yakin semblait satisfait de sa performance:
Embolo n'a pas que convaincu son sélectionneur: la presse nationale est unanime au moment de juger sa prestation face aux Irlandais. Dans la NZZ am Sonntag, on peut lire qu'il «a été à l'image de la Suisse: mobile, volontaire et inspiré offensivement, contrairement au match à Belfast».
La prestation XXL de Breel Embolo ce soir 🔥🇨🇭
— KMedia (@KMedia_ch) October 9, 2021
Il ne manquait que le but.
2 assists, des dribbles et des courses impressionnantes 🚀 pic.twitter.com/87MOfBn18m
Du côté de la presse romande et du Matin Dimanche, on affirme que ce sont notamment les retours de Shaqiri et d'Embolo qui «ont offert des solutions offensives». Des critiques positives, certes, mais qui ne doivent pas faire oublier le manque d'efficacité des joueurs offensifs, comme le soulignait Kevin Mbabu hier après la rencontre:
On aurait tendance à l'oublier, mais Breel Embolo est encore jeune. Il n'a que 24 ans. Talent précoce, il s'était imposé dès ses 18 ans au FC Bâle, inscrivant par la suite 21 buts en 60 matchs de Super League. Un très bon ratio pour un jeune attaquant.
Depuis son départ pour l'Allemagne, c'est forcément plus compliqué, le niveau y étant bien plus relevé. Mais il reste sur deux saisons pleines avec le Borussia Möchengladbach: 13 buts et 14 passes décisives au total. Un bilan qui démontre que Breel Embolo arrive à maturité. Sa forme du moment est également remarquable, comme le montre ce magnifique but inscrit la semaine dernière:
[⚽️ VIDÉO BUT] 🇩🇪 #Bundesliga
— beIN SPORTS (@beinsports_FR) October 2, 2021
💥 Breel Embolo marque déjà le but du weekend !
😍 Un retourné acrobatique de toute beauté !https://t.co/r2tXdwmLIM
Cette maturité était déjà perceptible à l'Euro 2020 où il a été très bon dans un système à deux attaquants. C'est lui qui avait notamment marqué contre le Pays de Galles. À cinq mois de fêter ses 25 ans, Breel Embolo possède encore de belles années devant lui. Avec un Seferovic qui arrive sur ses 30 ans, il devrait rapidement devenir le leader offensif de la Nati.
Avec, on l'espère, un peu plus de réussite devant le but pour pouvoir entendre beaucoup plus souvent ce merveilleux chant suisse allemand : «I de Nati, de Schwiizer Nati, do esch de Breel dihei. I de nati, de Schwizer Nati, do esch de Breel dehei. Oh Embolo, oh Embolo etc…»