Immense sensation aux Mondiaux d'athlétisme
C’est une sensation dans le petit monde de l’athlétisme: dimanche, Jimmy Gressier a remporté le 10 000 mètres des Mondiaux de Tokyo. Un exploit, tant cette distance est traditionnellement dominée par les coureurs d’Afrique de l’Est.
Certes, Gressier n’est pas le premier athlète européen à être sacré sur 10 000 mètres. Cependant, ils sont peu nombreux à avoir réalisé une telle performance.
L’Italien Alberto Cova avait ouvert la voie en 1983, lors de la première édition des Championnats du monde. Plus récemment, Mo Farah s’est imposé à trois reprises entre 2013 et 2017. Originaire de Somalie, pays voisin du Kenya, il portait les couleurs de la Grande-Bretagne, où il s'est formé. En dehors de ces deux noms, le titre mondial est toujours revenu à des Ethiopiens, des Kenyans ou des Ougandais, ce qui signifie que le 10 000 mètres est l'une des rares disciplines à échapper à la puissante équipe américaine, autant chez les hommes que chez les femmes.
Au départ d’une course relevée, marquée par la présence de nombreux coureurs capables de descendre sous les 27 minutes, mais aussi par l’absence du triple champion du monde Joshua Cheptegei, Jimmy Gressier ne figurait pas parmi les favoris à la victoire. D'ailleurs, il présentait seulement le 15ᵉ meilleur temps des finalistes.
Mais en grand championnat, le chronomètre ne veut souvent rien dire. Et quand seule la médaille compte, la course devient stratégique. La preuve: un peloton compact s'est présenté à mi-parcours sur des bases lentes de 30 minutes et 20 secondes, annonçant un final ébouriffant. Un scénario presque idéal pour Gressier, vainqueur de la Diamond League sur 3000 mètres fin août à Zurich, un mois seulement après avoir battu son record personnel sur 1500 mètres.
Dans une fin de course où dix coureurs se disputaient encore le titre à 200 mètres de l’arrivée, le Français a su tirer son épingle du jeu, en augmentant nettement sa cadence dans la dernière ligne droite, tout en profitant habilement des ouvertures devant lui. Il s'est finalement imposé devant l’Ethiopien Yomif Kejelcha, seul homme à perpétuer la grande tradition africaine sur 10 000 mètres, étant donné qu'un autre Européen, le Suédois Andreas Almgren, a complété le podium.
Travail acharné, lutte antidopage et Decathlon
La victoire de Jimmy Gressier est celle de tous ces coureurs engagés dans une discipline ingrate, où les occasions de gagner se limitent souvent aux compétitions nationales et continentales. C’est donc le triomphe de la persévérance, mais aussi celui du travail, auquel Gressier ne s’est jamais soustrait. Lui qui, en bon «gamin du Nord», aime rappeler que sa plus grande source d’inspiration n'est autre que son grand-père, ancien docker.
Le succès du natif de Boulogne-sur-Mer est aussi celui de la lutte antidopage, comme il l'a lui même confié après sa course. «Aujourd’hui, j’ai battu l’Afrique de l’Est. Ne nous mentons pas, vous savez que je ne suis pas naïf: l’AIU (réd: Athletics Integrity Unit) fait un travail énorme, et cela contribue à rééquilibrer un peu les choses», a-t-il déclaré, évoquant ici le fléau du dopage dans l’athlétisme kényan, ravivé ces derniers jours par le contrôle positif de Joyline Chepngeno, récente lauréate de Sierre-Zinal.
Gressier, champion du monde, c’est enfin la victoire d’un équipementier peu présent à ce niveau de compétition: Decathlon et sa marque Kiprun, que le coureur a rejoint en début d’année après plusieurs années chez Nike. Une histoire qui illustre une fois de plus la qualité des produits d'une chaîne souvent négligée par les spécialistes, et qui rappelle les performances des cycles Decathlon, salués après les succès l'an passé de l’équipe cycliste AG2R.
