Sport
Commentaire

Football: Gianni Infantino a gagné | Commentaire

MIAMI, FLORIDA - NOVEMBER 05: FIFA President Gianni Infantino on stage during America Business Forum at the Kaseya center on November 05, 2025 in Miami, Florida. (Photo by Leonardo Fernández - FIFA/FI ...
Gianni Infantino est plus que jamais installé confortablement sur le trône de la Fifa. Image: getty
Commentaire

Gianni Infantino a gagné

Le président de la Fifa a réussi à faire taire toutes les critiques contre lui et est plus indéboulonnable que jamais.
22.11.2025, 16:0022.11.2025, 16:00
David Digili

Curaçao compte exactement 155 826 habitants selon le dernier relevé de l’année 2023. Sur cette minuscule île située au nord-nord-est de l’Amérique du Sud, c’est actuellement l’effervescence: sa sélection s'est qualifiée pour sa toute première Coupe du monde.

«Célébrez votre incroyable succès, et nous nous réjouissons de pouvoir vous accueillir chez nous l’an prochain», a félicité Gianni Infantino, le président de la Fifa. L’omniprésent patron du football mondial revendiquera bien assez vite le succès de Curaçao – au moins une partie – pour lui-même.

Curacao players celebrate qualifying for the 2026 FIFA World Cup after their game with Jamaica in Kingston, Jamaica, Tuesday, Nov. 18, 2025. (AP Photo/Collin Reid)
L'émotion de la qualif pour leur premier Mondial était très forte chez les footballeurs de Curaçao. Image: keystone

Avec l'île caribéenne, l’Ouzbékistan, la Jordanie et le Cap-Vert participeront également à leur premier Mondial. La gratitude éternelle de ces quatre pays ira à Infantino. Car le Suisse, en imposant l’élargissement du tournoi de 32 à 48 participants, a rendu possible l’accession à la compétition de tels outsiders.

Et le boss de la Fifa a gagné. Pas seulement sur ce point, d'ailleurs. Les critiques visant Infantino, provenant d’acteurs de poids, se sont largement tues. Depuis son élection à la présidence de la Fifa en février 2016, le dirigeant de 55 ans n’a probablement jamais été aussi solidement installé dans ses fonctions. Il avait pourtant essuyé, notamment en Europe, des critiques acerbes depuis le premier jour: sur sa gouvernance jugée féodale, sur l’exploitation sans scrupules de la vache à lait qu’est le football, sur sa proximité discutable avec des autocrates – et ceux qui aspirent à le devenir.

Dernier exemple en date mardi soir: une délégation emmenée par Gianni Infantino et le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane – lequel n’hésite pas à faire mettre en pièces ses opposants politiques – était invitée à la Maison Blanche par le président américain Donald Trump. Le multiple Ballon d’or Cristiano Ronaldo était également présent avec sa compagne lors du dîner, essentiellement en tant qu’ambassadeur du football saoudien, le pays devant organiser la Coupe du monde 2034.

Ronaldo joue depuis 2023 à Al-Nassr et compense sa descente dans l’insignifiance sportive par un salaire grotesque de 200 millions d’euros par an. «D’après ce que j’ai vu, je suis encore plus convaincu que 2034 sera la meilleure Coupe du monde de tous les temps», déclarait déjà le Portugais en décembre 2024 dans une vidéo de relations publiques très soignée.

Après la visite à Washington, il a fièrement posté des photos avec Trump, qu’il a signées ainsi:

«Merci, Monsieur le Président»

Quiconque estimait – à juste titre – Lionel Messi supérieur a désormais une raison de plus...

Ronaldo a rencontré Trump à la Maison Blanche, et l'a remercié.
Ronaldo a rencontré Trump à la Maison Blanche, et l'a remercié. image: instagram

Infantino, lui aussi, s’était laissé instrumentaliser la veille déjà, pour la énième fois, par Trump et son agenda de politique intérieure, ou du moins utiliser comme faire-valoir. «Si nous pensons qu’il existe des signes de problèmes, je demanderais à Gianni de déplacer l’événement dans une autre ville», menaça de nouveau le républicain à l’attention des villes-hôtes gouvernées par les démocrates pour le tournoi de l’an prochain. Infantino, présent aux côtés de Trump, ne parvint qu’à articuler un vague:

«Nous travaillons ensemble et devons veiller à ce que tous les fans venus de l’étranger puissent vivre une fête du sport»

La tête du football mondial n’est plus guidée par aucun sens moral, elle l’a depuis longtemps totalement perdu. Ce sport qui aime tant se présenter comme inclusif, divers et ouvert restera encore des années sous la férule d’un homme qui cherche à en maximiser les profits et qui, pour ce faire, recherche volontiers la compagnie de dirigeants piétinant précisément ces valeurs.

Certes, la proximité malsaine du football avec des régimes autoritaires n’est pas une nouveauté – rappelons la Coupe du monde 1978 en Argentine, alors sous la coupe d’une brutale dictature militaire. Après le tournoi, le capitaine allemand de l’époque, Berti Vogts, déclara dans une phrase restée célèbre: «L’Argentine est un pays où règne l’ordre. Je n’ai pas vu un seul prisonnier politique.»

En 2013, Franz Beckenbauer, à propos de la future Coupe du monde au Qatar neuf ans plus tard, se fourvoya de manière similaire. Interrogé sur les conditions de travail très critiquées dans l’émirat, le «Kaiser» affirma – reprenant l’aveuglement de Vogts des décennies plus tôt – qu’il n’avait «pas encore vu un seul esclave au Qatar». Et le tournoi de 2018, lui, a eu lieu en Russie.

epa06807614 Saudi Arabia's Crown Prince Mohammad bin Salman (L), FIFA president Gianni Infantino (2-L) and Russian President Vladimir Putin (3-L) attend the opening ceremony before the FIFA World ...
Infantino au milieu de Mohammed ben Salmane et Vladimir Poutine, au Mondial 2018 en Russie. Image: keystone

Mais en 2025, la trumpisation du football progresse. Gianni Infantino en «faiseur de deals», qui ne connaît ni bien ni mal, seulement les prochaines recettes en milliards.

Et cela ne semble plus déranger grand monde. C'est inquiétant.

Fort soutien parmi les petites nations du foot

Gianni Infantino s’est assuré au fil des années le soutien des autres continents du football, hors d’Europe, grâce à des services complaisants; sa promesse – finalement tenue – d’augmenter le nombre de participants au Mondial au bénéfice des fédérations les plus modestes lui a valu les suffrages de l’Amérique du Nord et centrale, de l’Afrique et de l’Asie. Mais la monétisation croissante du football profite également à ces fédérations. D’ici 2026, plus de 5 milliards de dollars auront été versés aux 211 pays membres sous la présidence d’Infantino.

Et les grands clubs européens n’ont pas été laissés de côté: pour la Coupe du monde des clubs, disputée pour la première fois cet été sous un format controversé, la Fifa a fait taire leurs protestations – liées au calendrier surchargé – en distribuant un milliard d’euros de primes.

Un donnant-donnant dans la pure tradition trumpienne. «Beaucoup de pays n’avaient fait que rêver de la Coupe du monde – désormais, ils en ont la possibilité», se félicitait Infantino en 2017 après la décision.

«Nous sommes au 21e siècle. Le football est global, pas réservé à l’Amérique du Sud ou à l’Europe»

L'Helvète a reçu l’appui du très honoré ex-entraîneur à succès français Arsène Wenger, qui s’est depuis des années déjà ravalé au rôle de porte-parole des projets d’Infantino en tant que «directeur du développement mondial du football» de la Fifa. «Si davantage de pays ont une chance d’accéder à la scène mondiale, ils feront plus pour le développement du football», affirmait Wenger en marge de la Coupe du monde 2022 au Qatar.

DOHA, QATAR - NOVEMBER 21: FIFA President Gianni Infantino (L) with FIFA Chief of Global Football Development Arsène Wenger during the FIFA World Cup Qatar 2022 Group A match between Senegal and Nethe ...
Arsène Wenger (à droite) est un très bon porte-parole des projets d'Infantino. Image: getty

Les inquiétudes concernant le niveau des matchs, notamment de la phase de groupes, avec un nombre accru de participants au mieux de troisième ordre, sont rapidement balayées. «Même dans une Coupe du monde à seulement deux équipes, l’une d’elles serait toujours l’Allemagne», avait répliqué un jour Infantino avec suffisance aux critiques de l’ancien sélectionneur Joachim Löw sur le format à 48 participants.

«Pour beaucoup d’autres pays, cette Coupe du monde est la chance d’être enfin là»

Il se complaît notoirement dans son rôle d’apôtre du football dans les régions en développement. Outre les quatre débutants, Panama, Haïti, le Qatar, la Nouvelle-Zélande et le Canada seront également présents en 2026.

Infantino ne doit craindre aucune opposition sérieuse. Au contraire. Lors de la prochaine élection présidentielle en 2027, il devrait être reconduit et diriger la fédération jusqu’en 2031, bien que seules trois mandats soient autorisés. Un tour de passe-passe doit lui permettre de se maintenir: il a certes succédé en 2016 au démissionnaire Sepp Blatter, mais la Fifa ne compte comme première mandature d’Infantino que sa (ré)élection de 2019; il ne serait donc élu pour la troisième fois qu’en 2027.

FIFA President Gianni Infantino, right, hands the FIFA World Cup Winners Trophy to President Donald Trump during an announcement in the Oval Office of the White House, Friday, Aug. 22, 2025, in Washin ...
Gianni Infantino entretient des liens étroits avec Donald Trump. Image: keystone

Au total, celui qui apparaissait comme un espoir après l’ère Blatter, marquée par les scandales, serait resté 15 ans à la tête du football mondial, au lieu des 12 autorisés. Lors de l’élection à la présidence, chaque pays dispose d’une voix – le quadruple champion du monde allemand a donc le même poids que la lanterne rouge du classement mondial, Saint-Marin.

«Le fait est que de nombreuses fédérations ont déjà signalé leur soutien au président en exercice Gianni Infantino», justifia un jour le président de la Fédération allemande, Bernd Neuendorf, la décision de ne présenter aucun candidat face à lui lors de l’élection de 2023.

La perspective que la situation change en 2027 est plus mince que les chances de sacre de Curaçao à la Coupe du monde l'an prochain.

Adaptation en français: Yoann Graber

Plus d'articles sur le sport
Les hooligans plombent le foot suisse dans ce classement UEFA caché
Les hooligans plombent le foot suisse dans ce classement UEFA caché
de Stefan Wyss
Les ZSC Lions ont un dilemme avec leur coach
Les ZSC Lions ont un dilemme avec leur coach
de Klaus Zaugg
Red Bull provoque ses adversaires en F1 avec une blague malicieuse
Red Bull provoque ses adversaires en F1 avec une blague malicieuse
de Lisa Slomka
Ce tennisman suisse fait une révélation aussi rare que courageuse
Ce tennisman suisse fait une révélation aussi rare que courageuse
de Yoann Graber
Ce club a réussi ce que Thoune rêve de faire
Ce club a réussi ce que Thoune rêve de faire
de Romuald Cachod
Shaqiri: «Je ne me sens pas assez protégé sur le terrain»
Shaqiri: «Je ne me sens pas assez protégé sur le terrain»
de Christoph Kieslich, Céline Feller
Comment Verstappen a réussi son improbable retour et rêve de titre
Comment Verstappen a réussi son improbable retour et rêve de titre
de Jasmin Steiger
Le coach de Gottéron a imposé un changement radical à ses joueurs
Le coach de Gottéron a imposé un changement radical à ses joueurs
de Ralf Meile
«Je suis confiant»: Hakan Yakin veut retrouver un banc
«Je suis confiant»: Hakan Yakin veut retrouver un banc
de Daniel Wyrsch
On a cuisiné la joueuse de la Nati qui a tout lâché pour la Floride
On a cuisiné la joueuse de la Nati qui a tout lâché pour la Floride
de fred valet, marine brunner
Ce club va tester un modèle de billetterie inédit
Ce club va tester un modèle de billetterie inédit
de Romuald Cachod
Lara Gut-Behrami sort du silence et évoque son avenir
Lara Gut-Behrami sort du silence et évoque son avenir
de Ralf Meile
Un matériel révolutionnaire agite le monde du ski
Un matériel révolutionnaire agite le monde du ski
de Romuald Cachod
La Suisse a «un retard» qui prétérite ses chances aux JO
La Suisse a «un retard» qui prétérite ses chances aux JO
de Ralf Streule
Pourquoi les joueurs de NHL vont toucher 105% de leur salaire
Pourquoi les joueurs de NHL vont toucher 105% de leur salaire
de Adrian Bürgler
Les Emirats bâtiraient des montagnes pour propulser Pogacar
1
Les Emirats bâtiraient des montagnes pour propulser Pogacar
de Romuald Cachod
«Shaqiri m’en a voulu pour mes remarques sur son poids»
«Shaqiri m’en a voulu pour mes remarques sur son poids»
de Christoph Kieslich
Bastardoz quitte la RTS et révèle la folle histoire qui a lancé sa carrière
Bastardoz quitte la RTS et révèle la folle histoire qui a lancé sa carrière
de Yoann Graber
Comme Lara Gut-Behrami, ces stars privées d'adieux
Comme Lara Gut-Behrami, ces stars privées d'adieux
de Julien Caloz
Elle réussit un record du monde fou
Elle réussit un record du monde fou
de Lucas Zollinger
Cet adversaire du LHC a une drôle de manie
Cet adversaire du LHC a une drôle de manie
de Klaus Zaugg
Franjo von Allmen: «Je ne marche pas comme Odermatt»
2
Franjo von Allmen: «Je ne marche pas comme Odermatt»
de François Schmid-Bechtel, Martin Probst
Bencic fait une confidence sur ses projets familiaux
Bencic fait une confidence sur ses projets familiaux
de Marcel Hauck
Ce mythique club suisse aura son musée
Ce mythique club suisse aura son musée
de Christoph Kieslich
Le Real Madrid a commis une bourde très malaisante
Le Real Madrid a commis une bourde très malaisante
de Yoann Graber
Les hockeyeurs auront une nouvelle obligation aux JO
Les hockeyeurs auront une nouvelle obligation aux JO
de Julien Caloz
Ce prestigieux tournoi de hockey est en grand danger
Ce prestigieux tournoi de hockey est en grand danger
Un autre scénario existe pour Lara Gut-Behrami
Un autre scénario existe pour Lara Gut-Behrami
de Étienne Wuillemin
Ce champion du monde avec Xhaka a eu une carrière démente
Ce champion du monde avec Xhaka a eu une carrière démente
de Robin Walz
Swiss-Ski se relève et Shiffrin flambe: les 7 enseignements de Gurgl
Swiss-Ski se relève et Shiffrin flambe: les 7 enseignements de Gurgl
de Sven Papaux
Cette pépite de la Nati suscite l’intérêt des Serbes
Cette pépite de la Nati suscite l’intérêt des Serbes
de Nik Dömer
«C'était un accident»: ce skieur romand a frôlé le pire
«C'était un accident»: ce skieur romand a frôlé le pire
«Mes pieds se sont aplatis d'une pointure»: elle filme un défi fou en Suisse
1
«Mes pieds se sont aplatis d'une pointure»: elle filme un défi fou en Suisse
de Yoann Graber
Le club français préféré des Jurassiens n'est pas mort
Le club français préféré des Jurassiens n'est pas mort
de Romuald Cachod
Gianni Infantino a gagné
Gianni Infantino a gagné
de David Digili
La face sombre de Curaçao, invité surprise du Mondial 2026
La face sombre de Curaçao, invité surprise du Mondial 2026
de Romuald Cachod
Boycottée, cette équipe israélienne passe sous pavillon suisse
Boycottée, cette équipe israélienne passe sous pavillon suisse
de Valentin Grünig
Ce coup d'envoi insolite a mal tourné
Ce coup d'envoi insolite a mal tourné
de Yoann Graber
Un coup de théâtre se profile au sein de la Nati de hockey
Un coup de théâtre se profile au sein de la Nati de hockey
de Klaus Zaugg
Un Romand a vu la NFL en Europe: «On a pris une claque»
Un Romand a vu la NFL en Europe: «On a pris une claque»
de Julien Caloz
Les 10 chauves les plus sexy
1 / 12
Les 10 chauves les plus sexy

Au sommet du classement: Dwayne “The Rock” Johnson, avec un score impressionnant de 8,84 sur 10 sur l’échelle du sexy.

source: chris jackson collection / chris jackson
partager sur Facebookpartager sur X
On a goûté le vin valaisain de Lionel Messi
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
Avez-vous quelque chose à nous dire ?
Avez-vous une remarque ou avez-vous découvert une erreur ? Vous pouvez nous transmettre votre message via le formulaire.
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Même affaibli, Marco Odermatt reste le plus rapide
Le Nidwaldien était annoncé malade en début de semaine, gêné par une petite grippe. «J’ai attrapé quelque chose», confiait-il encore mardi au Blick. Deux jours plus tard, il remporte le premier super-G de la saison à Copper Mountain, aux Etats-Unis.
Deuxième course de la saison pour Marco Odermatt, et deuxième victoire! Le Nidwaldien, qui avait gagné le géant d'ouverture à Sölden, a remis ça jeudi à Copper Mountaint à l'occasion du premier super-G de l'hiver.
L’article