En d'autres termes: regardez les matchs de Novak Djokovic. Un exercice auquel beaucoup de supporters de Federer refusent encore de se plier, ne supportant pas de voir les records du Maître malmenés sous leurs yeux. Or, il est peut-être temps de ne plus vivre dans le déni.
Evidemment, on commencera en douceur, pourquoi pas en regardant une petite partie de la finale entre Djokovic et Daniil Medvedev? Le début du match (programmé à 22h00 en Suisse ce dimanche soir) est un moment indiqué pour deux raisons:
On ne peut que vous recommander de privilégier un environnement apaisant durant la retransmission du match. Allumez quelques bougies à l’huile essentielle de romarin, cajolez le chat (idéalement un Maine coon) et hydratez-vous avec une infusion aux plantes entre chaque changement de côté. Surtout, ne surestimez pas vos capacités: suivre un set ou deux, c'est déjà une très belle performance.
Enfin, soyez attentifs aux réactions de votre organisme: bouffées de chaleur, palpitations ou tensions dans les cervicales sont autant de signes qui doivent vous alerter, et vous inciter à zapper sur la chaîne Mezzo pour une rediff' de la «sonate n°9 en la majeur» de Beethoven.
La tentation est grande, quand une catastrophe est sur le point de s'abattre, de se dire qu'elle aurait pu être évitée si d'autres choix avaient été opérés. Dans le cas de Federer, cela nous renvoie forcément à la finale de Wimbledon 2019, la défaite la plus cruelle de la formidable carrière du Bâlois, éconduit en cinq sets (et 4h55 de jeu) par Djoko après avoir manqué deux balles de match sur son service.
Il y a aussi ces échecs en demi-finale de l'US Open 2010 et 2011, toujours contre Djokovic, ou celui de 2009 en finale contre Juan Martin Del Potro; et ce match, CE MATCH contre Rafael Nadal en finale de Wimbledon 2008 (ne comptez pas sur nous pour vous remettre la vidéo, on n'est clairement pas prêts).
La vérité, c'est que ces occasions gâchées appartiennent au passé. Il est peut-être temps de passer à autre chose, non?! Le magazine féminin Cosmopolitan livre d'ailleurs les cinq clés d'une nouvelle vie: comprendre pourquoi on stagne; s'accorder le droit d'aller mieux; faire le premier pas; lâcher prise et y arriver vraiment. «Chum jetzt!», comme dirait Federer.
Djoko n'est pas très populaire en Suisse, et ce n'est pas seulement parce qu'il a souvent battu l'idole nationale.
C'est d'abord parce qu'il est arrivé après Federer et Nadal et qu'il n'a pas tout de suite trouvé sa place, entre l'élégance du premier et la puissance du second. Ensuite, parce qu'il a essayé de se faire aimer du public par tous les moyens, au risque parfois d'agacer. «Il veut tellement être aimé que je ne peux pas le supporter», avait pointé Nick Kyrgios en 2019. Enfin parce que son attitude sur le court est clivante: son style de jeu froid et réaliste n'est pas très spectaculaire et ses craquages sont récurrents.
Il y a pourtant plein de raisons, aussi, d'aimer ce garçon né à Belgrade en 1987 et devenu le meilleur retourneur de l'histoire. Athlète doté d'un physique hors du commun, savant gestionnaire de ses efforts, Novak Djokovic brille sur toutes les surfaces grâce à ses qualités techniques, son sens du jeu et sa force mentale.
Imaginer que le record co-détenu par Federer puisse être battu par un champion aussi complet peut être une source de consolation (on y croit à moitié en l'écrivant, mais on est persuadé que c'est la voie à suivre 🧘♂️).
Si le pire arrive dimanche, il faudra s'accorder le droit d'être triste, prévenir les amis que ça ne va pas fort, dorloter «Fedex» (le nom du Maine coon) et poser un jour ou deux pour aller aux bains de Charmey (FR) ou en retraite spirituelle sur le chemin de Saint-Jacques.
Mais ensuite tout doit redevenir comme avant. Car la vie continue. Federer est certes blessé au genou, mais tant qu'il n'a pas annoncé la fin de sa carrière, tous les rêves sont permis. Y compris celui de le voir remporter un ultime Grand Chelem en 2022.